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L'Arlequin de sa dernière période

Samedi 27 janvier 2024

Par Georges Rouault

Georges Rouault (Français, 1871-1958), Arlequin (harmonie rose), c.1948-1952
Georges Rouault (Français, 1871-1958), Arlequin (harmonie rose), c.1948-1952
Georges Rouault (Français, 1871-1958), Arlequin (harmonie rose), c.1948-1952
George Rouault au travail

Georges Rouault (Français, 1871-1958)

Arlequin (harmonie rose),c.1948-1952

Toile.
Cachet de l'atelier au dos de la toile.

Haut. 40,7 Larg. 31,8 cm.
Cadre en bois noirci (53 x 44 cm).

Provenance : collection du bassin d'Arcachon.

Georges Rouault, ca.1948-1952. A painting of Harlequin.

Bibliographie : Olivier Nouaille et Olivier Rouault,"Rouault l'oeuvre peint", Fondation Georges Rouault, 2021, reproduit p. 299 au n° 4427-3185.

Avis d'inclusion au catalogue complet des oeuvres de Georges Rouault, par Jean-Yves Rouault, président de la Fondation Rouault en date du 5 décembre 2013.
Certificat Art Loss Register, Londres, du 8 avril2024.

Réalisé par Georges Rouault à l’aune de la dernière partie de son œuvre, entre 1948 et 1952, Arlequin (harmonie rose) est à envisager comme une synthèse des réflexions de l'artiste, qui poursuit un thème qui lui est cher en adoucissant son vocabulaire esthétique.

Peintre inclassable, n’appartenant à aucun mouvement, Rouault propose sa réalité, sans retranscrire la vérité, préférant « tourner le dos à la nature », comme le rappelle André Suarès. Il se distingue en ce sens de ses prédécesseurs du XIXe siècle, tels qu’Honoré Daumier, Edgar Degas ou Henri de Toulouse-Lautrec, qui se sont illustrés dans les représentations circassiennes. Avec son cadrage serré, ne laissant apercevoir que la partie supérieure du buste d’Arlequin, cette œuvre s’inscrit dans le corpus des toiles réalisées à la charnière des décennies 1940 et 1950 (voir Olivier Nouaille et Olivier Rouault, op.cit., p. 299). L’artiste joue de variations dans la figuration des émotions. Ici méditatif avec un sourire à peine esquissé, Arlequin peut être aussi profondément joyeux, comme dans le tableau de 1947 (reproduit in Pierre Courthion, Georges Rouault, Paris, Flammarion, 1962, p. 281). Il ne transmet pas une « tristesse infinie », à l’inverse des toiles du début du XXe siècle, mais partage l’apaisement de son auteur. Arlequin (harmonie rose) trahit un adoucissement des tonalités du peintre et prône une matière épaisse. Il préfigure les tableaux du crépuscule de la carrière de Rouault, dans lesquels la frontière entre peinture et sculpture tend à s’amenuiser.

Georges Rouault travaille inlassablement sur la figuration des personnages du cirque et de la Commedia dell’arte, depuis les années 1902-1903. Ce tableau est l’un des derniers maillons de ses recherches menées sur Arlequin, après ses nombreuses représentations, notamment dans Divertissement, paru en 1943. « J’ai vu clairement que le « Pitre » c’était moi, c’était nous… presque nous tous… » écrit Georges Rouault à l’écrivain et philosophe Édouard Schuré en 1905. Ces personnages burlesques fournissent à l’artiste un support de méditation sur ses contemporains, sur le monde qui l’entoure et sur sa propre existence. « Il ne cherche pas simplement un moyen de traduire des préoccupations plastiques ou formelles sur la couleur et le mouvement, mais bien plus la possibilité d’exprimer tout ce qu’il peut y avoir de vie cachée derrière le maquillage, la poudre, les paillettes » (Danielle Molinari, Georges Rouault catalogue raisonné, Paris, Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, 1983, p. 31). Arlequin est ainsi le support d’une introspection.

Brice Langlois
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